1825.1

La Marque Postale

#  pli sans marque de la Poste !

¥  4 novembre 1825

!    De Caen pour Lisieux « Lizieux »      avec z selon la mode du XVIIIe      siècle.

T   Si la lettre avait été transportée par la poste le tarif était: Moins de 50 kms,       2 decimes jusqu’à 6gr.       3 decimes jusqu’à 8gr.

Pour les non marcophiles il est bon de rappeler qu’à cette époque, la distance se calcule de bureau à bureau, par la route la plus courte et que la voiture des Postes passe donc par N.D. D’Estrées (où il y a un relais de Poste) passage bien connu des locaux sous le nom de coupe-gorge .

Pour nos correspondants lointains, ce nom est donné à la sortie de N.D. d’Estrées vers Lisieux en raison d’une côte courte à trés fort dénivelé où les chevaux montaient au pas, et donc propice à des attaques de brigands.

Tarif du 24 Avril 1806.

★  photo du tarif 1806

(Catalogue des tarifs postaux, Alexandre, Joany, Desarnaud etc.)

&   Une mention manuscrite de port est en bas trés importante:

 » Remettre dix sols au porteur si la présente est parvenue le 6 novembre 1825″.

★  photo de cette indication

On note au passage que le montant est en sols (ou sous) ancienne mode, alors qu’en 1825 on est en système décimal depuis longtemps. Le dernier tarif postal faisant apparaître (en mixte) les sous et décimes est de 1796.

10 sols ou sous,  correspondant à 5 décimes. On est donc plus cher que la poste! Mais le service en plus le mérite certainement.

La deuxième observation la plus importante est que cette lettre a été confiée à un particulier ou un professionnel, voiture publique ou entreprise de roulage.

Voyez en complément la note de fin  en @1.

~  verso signature privée MC au crayon.

○   Cette lettre fut proposée sur Internet avec le descriptif « poste piétonne de Caen à Lisieux » = c’est inexact, il n’y a pas de poste piétonne entre Caen et Lisieux, il y a belle lurette que la poste a des voitures pour le courrier, qui va de Paris à Caen, tous les jours et inversement. Nous verrons ensuite le motif de cette confusion, et nous l’expliquerons (Nous ne jetons pas la pierre, le sujet était facilement trompeur).

 

La Lettre

★  photo de la lettre, format entier.

 

♡  Tabourieu (ou Tabouriev).

[ ]   Avoué prés la Cour Royale à Caen, nouvelle place St Martin, n°4

♥ M. De la Bretonnière ancien notaire à Lizieux.

=   Concerne une affaire « qui sera appelée à l’une des premières audiences… » entre époux Rivière et dame Liard.

>  Tabourieu, De la Bretonniere, Rivière, Liard, M.Mars (qui attend des fonds: probablement l’avocat).

<  Caen, Lisieux, la Cour Royale.

₩  l’entête est en partie imprimé au nom et titre de l’expéditeur.

¤   Au verso un sceau de cire, de fermeture, partiel, monogrammé.

○  on remarque en haut du texte une annotation manuscrite du destinataire à Lisieux (De la Bretonniere) :  » écrit à Rivière par la / poste piétonne le 5 id ».

Le voilà notre piéton! Il ne vient pas de Caen, il va de Lisieux à… chez Rivière (?) : c’est une autre lettre.

Nous expliquerons ce point essentiel de l’histoire postale au chapitre  @2.

★ photo agrandie de l’annotation.

○ Tabourier vendra son étude en 1829
★ photo annonce Gazette des Tribunaux 5 Fevrier 1829.

 

Le Papier

□   Feuillet (coupé) de 19,7×24,5cm grande feuille coupée au centre.

☆  filigrane au bord gauche, dans le sens vertical de la coupe de

F.DURAND ??  ♡     (2/3 lettres non lisibles possible  FIN ?)

★   Photo du filigrane.

Durand Françoise-André, connu à Caen (An2. ADC 75.F.28). Successeur (et fils?) supposé de Durand François-Louis, Caen, décédé en 1793, attesté depuis 1763 (ADC idem).

Ref. Catalogue Gaudriault p.204.

 

@1. Le voyage Caen-Lisieux

En dehors de la possibilité d’un portage privé (très peu probable) genre « ami qui va justement à Lisieux ce jour là », il existe 2 moyens principaux de faire remettre une lettre « hors la poste » :

◇ les entreprises de roulage, qui circulent quasi tous les jours sur ces trajets, et qui, outre les marchandises, prennent volontiers pour leurs clients habituels, des petits colis, des papiers importants, et parfois des lettres. A Lisieux ces maisons les plus connues sont,

Dufour rue de Caen, 105

Fromage Bd Sainte Anne, 5

Dans les annuaires leur métier est stipulé « commissionnaires de roulage ».

◇  Les entreprises de « voitures publiques » sont celles qui transportent les passagers, leurs bagages, quelques petits paquets et parfois des lettres importantes ou urgentes.

Selon les annuaires (ici nous citons Durand en 1839) pour Caen:

– A l’hôtel d’Espagne, entreprise Revel, Conard et C°  tous les 2 jours à 5h du matin, retour le soir à 8h.

– A l’hôtel du Commerce, service Verdun et C°, tous les 2 jours, à la même heure.

– A l’hôtel de France et à l’hôtel de la Poste, Laffite et Caillard tous les jours à 1h et 9h du matin.

– A l’hôtel du Commerce, Petit-Loisel tous les jours à 9h du matin.

Il faut préciser enfin, que dans leurs publicités de l’époque (Presse) ces entreprises ne manquent pas d’indiquer, sans utiliser le mot lettre ou courrier, qu’elles transportent toutes sortes de documents et papiers d’affaires utiles à leurs clients.

 

@2.

L’annotation concernant la « poste piétonne » est majeure pour notre histoire postale ( Revoyez la photo plus haut). Elle indique clairement que sa lettre à Rivière est portée par piéton, donc distribuée dans une commune rurale dépendant de la distribution de Lisieux. (36 communes, et parfois plus aprés, faisant partie de la distribution rurale de Lisieux!).

La Poste rurale est créée en France en 1830 (1 Avril). Nous aurons plus tard l’occasion d’en parler longuement dans notre catalogue des marques postales de Lisieux.

Cette création, suite de la Loi du 3 juin 1829, est en fait le fruit d’une longue cogitation, d’essais ou d’initiatives locales qui existaient parfois depuis longtemps (1769 dans la Drôme par exemple. Ref. Louis Lenain).

Il fallait bien en effet que quelqu’un porte les lettres: les traces sont peu nombreuses, et en trouver une à Lisieux est un coup de chance (bien aidé par Dominique Reynaud, Union Marcophile qui nous l’a indiquée).

Suivant les régions, et les termes locaux, ces porteurs peuvent être appelés : messager, courrier, piéton, pédon etc.

Pour Lisieux nous retiendrons le terme seul connu actuellement de

 » poste piétonne ».

Nous n’allons pas ici répéter ou plagier des études déjà réalisées, et qui de manière bien plus documentée ont déjà traité du sujet.

Au contraire, pour vous encourager à aller plus loin nous allons les citer et les mettre à l’honneur ici.

Dans un numéro spécial des Feuilles Marcophiles (suppl. 314) un collectif d’auteurs traite en profondeur de tout le fonctionnement de la Poste rurale. Concernant cette mise en place, Gilbert Douron fait un point important, et Alain Trinquier fournit une étude en profondeur sur son département du Var où les sources sont nombreuses et donnent donc un exemple parfait du sujet.

 

《 ¤ 》 voir: c’est facile, ce bulletin est disponible à la ShL (bibliothèque marcophilie). Sans copier, et simplement pour donner envie d’en savoir plus, un court extrait vous est offert ici ( Ces textes sont donc volontairement tronqués).

 

★ photos, FM 314.  2 extraits de Alain Trinquier

 

★ 2 extraits de Gilbert Douron

 

@3. L’ex notaire est Jean-Baptiste-François de Sales Cosnard de la Bretonnière, notaire royal à Lisieux.
Attesté dans l’almanach du commerce de 1811, et dans Affiches et annonces judiciaires de la Sarthe en 1816, pour avoir épousé la soeur de Me Lehalleur notaire au Mans.
Liard: ce nom est attesté dans la table décénale de 1812.

  • ◇ Liard Pauline Adèle
  • ◇ Josephine
  • ◇ Jeanne Célestine
  • ◇ Antoine Napoléon

(Ref. AD 14).

 

Il convient de préciser que ces études sont complétées de notes et de toutes les sources utiles au sujet.

En dernier lieu, remerciements à D . Reynaud, qui centralise les boites rurales pour toute la France et, toujours disponible, ne manque jamais de nous apporter une aide précieuse pour Lisieux.

 

 

@4. contribution de Raymond Raveaux

Dans un acte visionné récemment  (conservé à la ShL réf.  1.F.40) on trouve cet intitulé du notaire lexovien en 1812:
☆ photo ci-dessous

L’acte qui se termine selon les formules habituelles porte la signature « Cosnard » avec paraphe, ainsi que son sceau sec sous papier (au centre armoirie impériale) :
J.B.F.COSNARD-LABRETONNIERE NOTAIRE À LISIEUX (CALVADOS).
☆☆ 2 photos ci-dessous.